Que faire si on ne peux plus toucher un interactif tactile numérique?

Depuis une dizaine d’années, nous avons vu l’apparition des écrans tactiles dans les expositions. Ils sont devenus un moyen muséographique prisé par les institutions. Mais maintenant, avec la COVID-19, que pouvons-nous faire pour éviter les contacts ?
 
Comment transformer une expérience sur un écran tactile en évitant d’y toucher tout en conservant le contenu déjà présent ?
 
Voici quelques pistes de réflexion…

1 - FERMER L’ÉCRAN ET NE RIEN PRÉSENTER.

Quel est l’intérêt ?: C’est une intervention rapide et simple. Très économique !
Qu’est-ce que ça implique ?: On aura à coup sûr une perte de la qualité de l’expérience. En fait, on coupe littéralement du contenu au visiteur. Un écran éteint équivaut à un ‘trou noir’ dans l’exposition.

Ce que je suggère : Si le temps et les budgets manquent au musée pour une ouverture prochaine, je propose cette avenue. Par contre, il ne faut pas laisser l’écran tel quel dans l’exposition, car les visiteurs le toucheront de toute façon ! Et vous vous trouverez pris avec le même problème.

Je suggère minimalement d’imprimer un visuel en lien avec le contenu de l’interactif et l’appliquer sur l’écran. De cette manière, on évite le ‘trou noir’ et le nettoyage inhérent à la curiosité des visiteurs. Ne pas oublier qu’on peut toujours imprimer un code QR pour diriger les visiteurs sur une section du site web du musée en lien avec les thématiques de l’interactif.

2 - FOURNIR UN STYLET AUX VISITEURS.

Quel est l’intérêt ?: C’est facile à intégrer. Le coût d’implantation est léger et on évite les contacts directs entre les visiteurs et l’écran. On a également la possibilité d’identifier le stylet à l’image du musée.

Qu’est-ce que ça implique ?: Gestion de la part des équipes du musée. Est-ce qu’on donne les stylets ou bien on les récupère pour ensuite les désinfecter ?

Ce que je suggère : belle solution simple à installer, les coûts sont légers, approximativement de 0.50$ par stylet. Je suggère que les stylets soient récupérés à la fin de la visite pour éviter le gaspillage. Vous pouvez également vous munir d’une provision d’embouts de stylet, qui vous permettra de diminuer les frais reliés à l’usure.

3 - INSTALLER UNE INTERFACE NON TACTILE.

Qu’est-ce que c’est ?:C’est un dispositif qui détecte le mouvement du corps, des mains et même des doigts dans l’espace. Il traduit le mouvement corporel sur un curseur à l’écran. Exemple : Leap motion, Kinect, Caméra infrarouge, etc.

Quel est l’intérêt ?: On conserve toute l’interactivité de la station. Belle qualité d’innovation pour une réponse à la pandémie.

Qu’est-ce que ça implique ?: Il faut développer une application (API) qui fera le lien entre le visiteur, le dispositif de détection et l’interactif. Bien sûr, il faut aussi valider l’ergonomie du système sous forme de prototypes avec le public. Prévoir une modification au mobilier.

4 - créer UNE PRODUCTION VIDÉO POUR REMPLACER L’INTERACTIF.

Quel est l’intérêt ?: Présenter le contenu essentiel de l’interactif. L’écran reste actif.
Qu’est-ce que ça implique ?: Il y a des coûts reliés à une nouvelle production vidéo. On doit  revoir le scénario et choisir le contenu essentiel, car on ne peut tout présenter. C’est une  production linéaire (on contrôle la présentation du contenu) et pas interactive. Il faut aussi adapter l’équipement pour une présentation vidéo en boucle.

Ce que je suggère : C’est une belle option, quoique simpliste (on risque déjà d’avoir ce type de présentation dans le musée). Alors, pourquoi ne pas en profiter pour revisiter les thématiques avec la mise à jour du contenu (texte, iconographie, vidéo) et y ajouter du son ?

5- PRÉSENTER L’EXPÉRIENCE SUR UN APPAREIL MOBILE (TÉLÉPHONE OU TABLETTE)

Quel est l’intérêt ?: Conserver la qualité de l’expérience interactive. Le visiteur peut aussi en faire l’essai à la maison (ou à l’école ?)

Qu’est-ce que ça implique ?: Il y a des coûts reliés à l’adaptation de la programmation et du graphisme pour un appareil mobile. Selon ce qui a été développé initialement, on risque même de refaire une nouvelle programmation (ex. : accessibilité pour plusieurs appareils) et un nouveau graphisme (ex. : taille de la typo). Il faut également héberger l’expérience sur un serveur web (ordinateur branché à internet) sans oublier une connexion WIFI dans le musée. Les visiteurs doivent avoir leur appareil. Ne pas oublier que la taille de l’écran diminue l’ergonomie et la qualité de la présentation.

Ce que je suggère : Il est possible de diminuer les coûts de production dans le cas ou l’interactif est créé pour la première fois.

6 - L’APPAREIL MOBILE DES VISITEURS DEVIENT UNE MANNETTE DE CONTRÔLE.

Qu’est-ce que c’est ?: L’appareil mobile du visiteur entre en contact avec l’ordinateur de l’interactif et lui donne des commandes pour naviguer dans l’expérience.

Quel est l’intérêt ?: Conserver la qualité de l’expérience interactive.

Qu’est-ce que ça implique ?: Il y a des coûts reliés au développement d’une programmation pour connecter l’appareil mobile à l’ordinateur de l’interactif. Il faut également héberger l’expérience sur un serveur local (ordinateur installé dans le musée) sans oublier une connexion WIFI dans le musée. Les visiteurs doivent avoir leur appareil. Ne pas oublier que la taille de l’écran diminue l’ergonomie et la qualité de la présentation. Il faudra impliquer le graphiste dans l’élaboration de l’interface de contrôle sur le mobile.

Ce que je suggère : Il est possible de diminuer les coûts de production dans le cas ou l’interactif est créé pour la première fois.

Bref, on voit bien qu’il y a plusieurs options pour accommoder la nouvelle situation sanitaire. J’imagine que chaque musée trouvera sa propre solution adaptée à sa réalité. Bien que la pandémie nous force à revoir comment on souhaite interagir avec nos publics, j’espère qu’on retrouvera bientôt le plaisir de toucher, car il restera toujours un moyen cognitif important pour incarner des concepts.

Laurent Michel Tremblay
Scénographe